Le monastère des Augustines

Source : L’Infobec – Novembre 2017

Innovation

Ce projet de restauration d’envergure (42 M$) du plus ancien monastère-hôpital en Amérique du Nord visait le regroupement des archives et collections des 12 monastères-hôpitaux (dénommés Hôtel-Dieu) fondés par les Augustines, et l’accueil de particuliers souhaitant faire l’expérience du mode de vie des Augustines (lieu de mémoire habité). Il impliquait la reconversion des anciennes « cellules » en une soixantaine de chambres, l’aménagement d’une aire de restauration, d’une boutique, de salles pour événements, d’un musée, d’un centre d’archives et d’une réserve muséale.

La philosophie première était de veiller à retrouver l’état le plus authentique possible. Le bâtiment livré devait rester en termes d’ambiance un monastère, mais être mis aux normes et offrir les notions de confort d’aujourd’hui. Toutes les interventions électromécaniques devaient être réversibles et invisibles. Du moderne vient cependant se marier à l’ancien via la construction d’un hall d’accueil et d’une passerelle.

L’atteinte du résultat visé par le client ne pouvait se faire par une approche et des solutions conventionnelles. Ce projet a été réalisé à l’inverse d’une conception standard pour arriver à une intégration parfaite. Les contraintes électromécaniques devaient gouverner la conception. Le résultat atteint par les ingénieurs en mécanique et électricité est tout à fait unique, et aucun système n’est apparent à part les gicleurs.

Très peu de gaines de ventilation ont été utilisées, il y en a seulement au niveau 5 et au sous-sol. Pour le reste du bâtiment, les ingénieurs se sont servis de l’architecture comme conduit (foyers, escaliers).

Des éléments de structure ont servi de surfaces radiantes froides. Par exemple la passerelle structurale dans le hall est munie de climatisation radiante et permet de combattre la charge d’un hall majestueux vitré de plus de 10 mètres de haut.

Le bâtiment a fait l’objet d’une optimisation énergétique très poussée. Plusieurs scénarios d’occupation ont été réalisés et la composition du bâtiment (maçonnerie massive) a aussi été étudiée afin d’utiliser cette masse thermique. Une capacité de refroidissement de seulement 100 tonnes a pu être installée, alors qu’en conception traditionnelle elle aurait été de 225 tonnes.

Dans les salles d’exposition, un environnement s’approchant des conditions muséales a été créé. Ceci a été un grand défi compte tenu que l’enveloppe du bâtiment n’était pas modifiée (murs de pierre non isolés) et que les fenêtres à simple vitrage étaient conservées.

Afin de conserver l’ambiance monastique, chaque source lumineuse a fait l’objet d’une étude pour assurer sa parfaite intégration.

Complexité

Découverte des plus vieilles fondations de l’Amérique du Nord à l’emplacement prévu pour la salle de mécanique principale.

La préservation de ce bâtiment d’exception a demandé un travail de réflexion très élevé et un effort de créativité et d’adaptabilité hors du commun.

Le Monastère faisant partie du patrimoine de l’Unesco, chacune des modifications a dû être approuvée par le MICC. La conception a dû s’ajuster au fur et à mesure de l’avancement de la déconstruction des planchers, plafonds et murs. Lors de l’excavation, les plus vieilles fondations de l’Amérique du Nord ont été découvertes à l’emplacement prévu pour la salle de mécanique principale. Afin de permettre leur mise en valeur, un nouveau concept électromécanique complet a dû être refait.

Pour ne pas altérer la durabilité du bâtiment à long terme, le point de rosée à l’intérieur des murs existants en maçonnerie devait être conservé, et ce, malgré l’ajout de climatisation et la transformation du mode de chauffage. De nombreuses études furent réalisées pour s’assurer de maintenir cette condition.

Le projet impliquait la séparation complexe des services électromécaniques du Monastère et de l’Hôtel-Dieu de Québec, alors que plus de 300 ans d’histoire liait les deux édifices et que les opérations de l’hôpital devaient être maintenues en tout temps.

Aucun entre-plafond n’était disponible. Pour permettre le passage des conduits à l’horizontale, les combles furent utilisés comme salle de mécanique et toute la tuyauterie et les gaines de ventilation servent de nourrice et alimentent les pièces individuellement.

Aucun appareil de rejet de chaleur ne pouvait être mis en toiture. Un champ de géothermie fut implanté sous le stationnement.

Environnement

La nature même du Monastère des Augustines consiste à assurer la pérennité du patrimoine afin que les générations futures puissent connaître et jouir de ce précieux héritage. Le développement durable faisait donc partie des principes directeurs du projet.

Le Monastère est chauffé et climatisé à 100 % par un système de géothermie. La chaleur est récupérée sur l’évacuation d’air vicié au moyen de roues thermiques. La ventilation se fait principalement par déplacement. Tous les appareils de plomberie sont à faible consommation d’eau. Tous les luminaires sont à DEL.

Afin de respecter le caractère patrimonial du bâtiment, il s’avérait primordial de retenir les approches et les solutions les moins intrusives. Une collaboration très étroite avec l’architecte et les autres intervenants a permis de minimiser la démolition et maximiser la récupération d’éléments existants. Par exemple, plusieurs radiateurs en fonte ont été restaurés et convertis en chauffage électrique. Tous les éléments de parquet et de plafond qui devaient être enlevés pour permettre le passage de la tuyauterie et de la filerie ont été numérotés puis réinstallés.

Beaucoup d’énergie a également été mise pour préserver un saule présent dans la cours. Il est intimement lié à l’histoire des Augustines puisque sa plantation remonte à la construction du Monastère au 17e siècle et qu’il a été l’élément de base de beaucoup de médicaments fabriqués par les religieuses. Le champ de géothermie, situé sous le stationnement, a notamment été construit à angle pour réduire son empreinte et protéger cet arbre de plus de 300 ans.

Conclusion

Ce projet représente l’héritage des Augustines qui se sont dévouées au soin des autres pendant près de quatre siècles. Pour créer un lieu de ressourcement et ainsi poursuivre leur mission, elles ont voulu ouvrir les portes de leur monastère fondateur et rendre accessible leurs collections et archives. Tel que souhaité, l’ambiance monastique a été préservée grâce à des systèmes électromécaniques invisibles et silencieux qui apportent un confort moderne dans un lieu empreint d’authenticité. Leurs reliques sont préservées et exposées. Le produit fini est très efficace énergétiquement, et les frais d’exploitation et d’entretien ont été minimisés.

Réalisation

Architecture : ABCP
Ingénierie mécanique et électrique : CIMA+
Ingénierie en structure et civil : WSP
Gérant de construction : Pomerleau

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